RAND()% - Graphique - generating sound from lemons
RAND()% - Capture d'écran de Max/Msp patch 'K-85' de Plank
RAND()% - Image d'une des artistes - Alku de Barcelone
RAND()% - Capture d'écran de Pure Data patch 'Pulse Grain' de Nullpointer
œuvre 2


RAND()%,
de Tom BETTS et Joe GILMORE (Royaume-Uni), 2003



RAND()% Génératif : « ayant la capacité de faire naître, de produire, ou de procréer. »

Rand()% est un noeud unique : une station radio en ligne qui présente de la musique générée par ordinateur. La musique générée par ordinateur n'est pas pré-enregistrée, et ne peut dans beaucoup de cas être répétée ; une telle musique est semblable en son essence aux systèmes émergents ou vivants tels que l'ADN : des ensembles de règles qui servent à produire des comportements (la vie sonore) dans le cadre de certains environnement appropriés.

Rand()% a été lancée par Joe Gilmore a.k.a. Planche et Tom Betts a.k.a. Nullpointer au Ultrasound Festival à Huddersfield au Royaume-Uni en novembre 2003. La station présente de la musique en « streaming » de manière permanente. Toutes les quinze minutes un nouveau morceau commence. Ce qui veut dire qu'un nouvel ensemble de règles prennent le contrôle de l'espace sonore.

Bon, je n'ai pas accès au code produisant les sons sur Rand()%, et un débat déjà ancien a toujours cours en informatique, à savoir si les générateurs numériques de nombres aléatoires produisent jamais réellement de l'aléatoire véritable, mais malgré tout il semble que l'on soit en droit d'affirmer que les programmeur-musiciens présentés sur Rand()% doivent avoir utilisé des générateurs de nombres aléatoires (après tout le site tient son nom de la fonction de rand() de c++ qui génère des nombres pseudo-aléatoires). Et dans les cas où les artistes n'ont pas utilisé de manière trop évidente les générateurs de nombres aléatoires, l'effet des différents algorithmes qui introduisent leurs paramètres dans des éléments sonores générés numériquement produit néanmoins une expérience sonore qui à l'oreille humaine (de concert avec le cerveau programmé par l'évolution pour reconnaître des motifs récurrents de manière innée) peut facilement donner l'impression d'être purement aléatoire.

Petit-déjeuner avec Rand()% 9 : 32 AM : si je m'étais branché une heure et demie plus tôt, j'aurais pu écouter les nouvelles sur Rand()%. Je me demande en quoi ces nouvelles peuvent consister : une pastiche d'extraits choisis de manière aléatoire à partir des bulletins de nouvelles en ligne ?... de toute façon, Rand()% ne dort jamais, les cyber-musiciens ne sont jamais fatigués, ce sont des processus autonomes qui échappent aux contraintes du monde physique, de l'inspiration, et/ou des limites pré-définies de l'harmonie et du rythme.

À 9:39 le vrombissement/gazouillement/ronflement de Rand()% commence à pénétrer mon cerveau somnolent : un orchestre de diodes, de condensateurs et d'oscillateurs s'accordent pour un pique-nique électronique. 9:30-45 AM à Montréal (13:30-45 heure GMT), et l'artiste du moment n'est nul autre que Plank a.k.a. Joe Gilmore, co-fondateur (avec tom betts a.k.a. Nullpointer) de Rand()%. Le ton général de l'œuvre est silencieux, tendre, mesuré et quelque peu ineffable. N'importe quel compositeur radical du vingtième siècle aurait été plus qu'heureux d'avoir la possibilité de jouer de manière aussi subtile d'une palette auditive aussi large, et pourtant c'est la norme sur Rand()%. Plusieurs logiciels sont devenus si puissants, qu'ils surpassent les instruments traditionnels, explorant les variations à une vitesse au delà de la capacité humaine.

Sur Rand()%, la cacophonie conceptuelle aléatoire idéale - le rêve de John Cage ! - est aisément mise en œuvre sous forme numérique de façon à pouvoir générer en théorie des variations pseudo-infinies de son œuvre dans son entier. Des palettes sonores visionnaires, idiosyncratiques, et audacieuses, réminescentes du style de Harry Partch, s'étagent sans répit dans des pièces itératives ; l'esprit de Stockhausen rôde sans nul doute autour de l'adresse IP de Rand()%... et peut-être qu'après une demi-décennie de théorisation critique, certains des compositeurs de Rand()% auront atteint un statut de visionnaire, leurs noms seront cités par des cyber-musiciens, et chuchotés le long des fils du réseau par des musicien-borgs produits de l'intelligence artificielle qui reconnaîtront les codeurs de Rand()% comme leurs ancêtres...

Les bases conceptuelles de l'œuvre sont fortes : les algorithmes récursifs et génératifs, les microtextures, les données converties en son de manière itérative. Le logiciel est riche et à la fine pointe : onde de choc, pureData, maxMSP. Et bien que la musique qu'on y peut y entendre soit souvent agaçante et choquante à l'oreille habituée aux harmonies traditionnelles, Rand()% fournit néanmoins à l'occasion une expérience esthétique révélatrice : l'âge de la composition informatique automatisée est venu.




David 'jhave' Johnston
(Traduit de l'anglais par Anne-Marie Boisvert)

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