Flaws
Flaws
Flaws
Flaws
œuvre 2


FLAWS,
de David 'jhave' JOHNSTON, 2003



Flaws Flaws, intro de l'artiste


CONTEXTE

Nous vivons dans une ère que son propre pouvoir d'annihilation de l'espèce rend blasée. Les armes de destruction massives sortent des chaînes de montage et sont vendues aux clients toutes idéologies confondues. En même temps, plusieurs gouvernements révèlent par leurs actions leur préférence pour l'agression, la vengeance et les massacres comme méthodes de solution des conflits. La conclusion est si évidente qu'elle en est presque banale : il est inévitable que quelqu'un quelque part sur cette planète à un moment donné dans un proche avenir déclenchera un orage nucléaire mortel.

Une des conséquences de la contamination radioactive de la biosphère est un taux accru de mutation. Flaws jette un regard satirique sur la naissance d'un bébé : ce bébé est pour nous un mutant. Pourtant, au sein de son monde, ce bébé est normal.


DEUX TANGENTES À CONSIDÉRER

Première tangente : Lyn Margulis a déjà par le passé décrit comme pollution la variation des niveaux de l'oxygène dans l'atmosphère pendant le précambrien. Elle a posé comme hypothèse que l'espèce humaine, qui dépend pour respirer de cette atmosphère d'oxygène enrichie, est le résultat de cette pollution. Par extrapolation, après quelques incidents nucléaires, et à mesure que le niveau général de radioactivité augmentera, il est probable qu'une espèce adaptée à ce nouvel environnement émergera.

Flaws est une production vidéo maison maladroite qui aurait été tournée par un membre de cette espèce. Une bande vidéo faite par un père qui s'évanouit pendant qu'il voit son enfant arraché de l'utérus.

Deuxième tangente : Je suis récemment sorti de la salle lors de la projection du troisième volet du Seigneur des anneaux après seulement 20 minutes. Pourquoi ? Simplement par ennui et par dégoût. J'ai été écoeuré de la façon dont tous les êtres moralement bons sont représentés en majorité par des humains conventionnellement beaux, tandis que les méchants sont tous gluants, laids, et ressemblent à des grands brûlés. Le film exemplifie malheureusement une certaine propagande de la culture occidentale : une peau claire et des pommettes bien dessinées sont synonymes de vertu. Les bons ont le droit de tuer tous ceux qui s'opposent à eux ; ils le font pour préserver leur façon de vivre. Le vice est débilitant et mène à la laideur physique qui doit être éradiquée.

Je pense que la réapparition de la phrénologie (et d'un eugenisme implicite) dans le divertissement populaire est simplement un symptôme de la façon dont en tant qu'êtres humains nous sommes moralement influencés par des notions de beauté profondément ancrées au point d'en être viscérales. Nous recherchons désespérément la perfection dans la publicité, dans l'art, chez nous-mêmes, et chez les autres. Flaws se veut une réponse à cette tendance. J'ai simplement voulu faire un film qui traite et s'amuse de ces préconceptions au sujet de la normalité et de la beauté. Flaws est ce film; et il est plein de défauts.

J'ai fait beaucoup d'erreurs techniques durant la production de ce film. Les os déchiraient la peau. Les cous tournaient comme des linges de vaisselle humides tandis que les bras s'agitaient en cercles à partir du coude. Les yeux sautaient hors de leurs orbites tandis que des polygones se désagrégeaient dans une explosion de données et de pixels. J'ai conservé certaines de ces mutations esthétiques, en les retravaillant à l'aide de AfterFX, et je les ai incorporé dans les panneaux latéraux de l'œuvre en ligne, comme autant de fils évolutionnaires parallèles.

En outre, cette œuvre comporte d'autres défauts moins intentionnels : les pixels inversés sous l'aisselle de la mère, la respiration mal synchronisée, les bras du docteur qui apparaissent brièvement comme des tubes creux non reliés au bébé, l'écran de barres de couleur de TV utilisé comme masque, le mouvement peu réaliste du bébé, la compression pour le Web « pixillée » et laborieuse... Ces défauts sont devenus (pour moi-même, alors que je rationalisais mon incompétence) des rappels intrigants et provocateurs de la façon dont l'analyse est visuellement enracinée et omniprésente. Les créatures humaines sont des machines d'analyse critique : nous formulons des jugements esthétiques aussi rapidement que nous sautons aux conclusions. Nous appelons cette rapide activité algorithmique non-verbale du nom d'instinct.

Ainsi c'est avec un parfait instinct d'innocence que j'espère que vous apprécierez ce petit film!


Post-scriptum : La qualité et le niveau d'expertise technique dans l'œuvre d'animation en 3D Flaws (que j'ai créée à l'aide du logiciel Maya de Alias Wavefront) sont incroyablement incompétents, débutants et amateurs. Cette œuvre a été créée dans le cadre du cours FMAN 398 à l'université Concordia au printemps de 2003 sous la supervision de la mervelleuse Alison Loader. Toutes les qualités techniques de l'œuvre lui sont redevables; toutes les faiblesses de cette œuvre sont attribuables à ma propre inexpérience.


David 'jhave' Johnston
Traduit de l'anglais par Anne-Marie Boisvert


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