œuvre 5
YAST,
de v.n.a.t.r.c.? (France), 2003
Le collectif v.n.a.t.r.c.? [Littéralement : v.ous n.'a.vez t.oujours r.ien c.ompris ?] nous offre YAST (Yet Another Sizing Tool), qu'il présente comme un « logiciel de web art créant à la volée des interfaces aléatoires, images, textes, urls, form, checkboxes, tout les ustensiles htmlisés du web, affichés à la volée dans une disposition sans cesse rafraîchie et toujours aléatoire, hasardeuse (script Python dans un écrin Zope, un des ingrédients maîtres de la recette), toujours neuve, de n secondes en n secondes : on ne voit jamais la même chose : l'information est manipulée sans intention, candidement, un régal de propagande perplexe! »1
« À la volée » est bien l'expression qui convient.
Car YAST est quelque chose de ludique, d'anarchique, de critique, à l'esthétique éclatée, déjantée, aux couleurs criardes, un collage hétéroclite toujours en mouvement, et qui change aux deux secondes : images de toute provenance ou origine, photos, graphiques, animations, dessins, cartoons, textes, citations, messages personnels, bannières, liens vers d'autres sites, etc, qui ne font que passer, se croiser, se superposer, de gauche à droite, de haut en bas, et puis s'en vont, pour passer rapide à autre chose. Le côté brouillon de l'œuvre est encore accentué par le fait que rien ne semble jamais ni cadré, ni organisé, ni arrangé, les images et les textes défilant au petit bonheur, d'autant plus que la page où ils s'affichent - si brièvement! - dépasse du cadre de l'écran, en longueur et en largeur, sans que personne semble s'en préoccuper. Même l'option « gaze fullscreen » offerte en haut de la page ne change pas grand'chose à l'affaire.
De plus, le visiteur est invité à participer, à envoyer ses inputs, suggestions, images, textes, ou sites à voir, pour alimenter la boulimie de YAST - lui garantissant ainsi une esthétique tous azimuts, dans la plus pure tradition libertaire. L'aléatoire est ainsi, avec YAST, soumis au test ultime : celui de son insignifiance, mais aussi celui du choc possible, et de l'illumination qui s'ensuit, et qui peut résulter, tout à coup, même seulement pour un petit moment, de l'accolement de certaines images avec certains textes. Pourquoi pas ?
Les membres du collectif v.n.a.t.r.c.? se situent de leur propre aveu dans la lignée des artistes dadas, (pré)pataphysiciens, etc :
Le collectif v.n.a.t.r.c.? cherchait - et cherche toujours
à re-(s)susciter la réflexion chez le regardeur, par
des moyens scénographiques non dégradants, encombrants toutefois bien que
peu coûteux, efficaces, redoutés, car porteurs d'une rhétorique inexpugnable,
ils visent des cibles visibles comme le Musée, l'Eglise, l'Ecole, la Rue, le Web.
Très vite, émerge de ce collectif à géométrie variable un certain nombre de
conceptions prépataphysiques, qui peu à peu s'agrégèrent en un recueil de textes
fédérés par une seule et unique ambition : changer d'art !2
Moins une œuvre qu'une « action », YAST se situe ainsi, par son esthétique comme par son effet, dans la foulée des autres « actions clandestines » de v.n.a.t.r.c.?, qui « sont le résultat de discussions sur les moyens d'action possibles dans le cadre d'un code esthétique puéril, ironique & inoffensif :
*leur principe: pas de dégradations des cibles
visées, expression urbaine humoristique,
grotesque ou tout simplement laide [avec pour] but avoué, [de] :
*Viser correctement leur but.
*Observer les réactions des institutions visées.
*Bâtir une conception de l'art propre à v.n.a.t.r.c.?
*S'adresser à un public improvisé.3
YAST est bien en somme un graffitti en mouvement perpétuel - un « régal de propagande perplexe! » - s'affichant, « à la volée », sur les murs de cet espace public qu'est le Web.
Notes
1 : b-l-u-e-s-c-r-e-e-n.net/misc/p2p/vnatrc/p2pFr.html 
2 : bio.vnatrc.net/
3 : bio.vnatrc.net/.
Anne-Marie Boisvert
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