Cartographie des Automatistes

 

Au 1257, rue Amherst (auj. Atateken)

Première exposition des Automatistes,

du 20 au 29 avril 1946

Au 1257, rue Amherst (auj. Atateken)

Première exposition des Automatistes,

du 20 au 29 avril 1946

Au 1257, rue Amherst (auj. Atateken)

Première exposition des Automatistes,

du 20 au 29 avril 1946

Au 1257, rue Amherst (auj. Atateken)

Première exposition des Automatistes,

du 20 au 29 avril 1946

Au 1257, rue Amherst (auj. Atateken)

Première exposition des Automatistes,

du 20 au 29 avril 1946

Claude Gosselin, C.M., 14 juillet 2020

 

Entre 1940 et 1946, pendant la deuxième guerre mondiale, le 1257, rue Amherst (aujourd’hui rue Atateken), servait de quartier général pour l’organisation The Woman Voluntary Reserve Corps / le Corps de réserve national féminin, fondée et dirigée par la Capitaine Julienne Saint-Mars-Gauvreau, la mère de Pierre et de Claude Gauvreau. Après la guerre, le Corps de réserve est dissout et le local n’est plus utilisé malgré que le loyer court toujours. C’est alors que madame Saint-Mars-Gauvreau le met à la disposition de ses fils et de leurs amis peintres pour y tenir une exposition simplement intitulée « Exposition de peinture » qui se tiendra du 20 au 29 avril 1946.

 

Ce sera la première exposition identifiée aux Automatistes, malgré le fait que tous les artistes qui formeront le groupe des Automatistes ne soient pas présents. Les exposants sont alors : Marcel Barbeau, Paul-Émile Borduas, Roger Fauteux, Pierre Gauvreau, Fernand Leduc, Jean-Paul Mousseau, Jean Paul Riopelle.

 

Cette exposition est dite la « première » malgré le fait qu’une autre exposition avait été présentée à New York en janvier 1946 au studio de danse de Francizka Boas. C’est Françoise Sullivan, alors élève de Francizka Boas qui organise l’exposition qu’elle intitule The Borduas Group. Elle présente les œuvres de Paul-Émile Borduas, Pierre Gauvreau, Fernand Leduc, Jean-Paul Mousseau, Jean Paul Riopelle et Guy Viau. Aucun de ces artistes n’étaient présents. L’exposition génère peu d’intérêt : même Pierre Matisse, galeriste à qui Françoise Sullivan montre les œuvres, ne s’enthousiasme pas devant les œuvres. Ce n’est que plus tard qu’il représentera Jean Paul Riopelle.

 

Certainement réalisé par le groupe, un communiqué publié dans Le Jour le 20 avril 1946 fait part de l’exposition : « Ces peintres, relativement jeunes, obtiennent l’essentiel pictural, la beauté plastique, commune à toutes les générations de peinture révolutionnaire, à Rembrandt, Delacroix, Cézanne, Picasso par les disciplines les plus évoluées qui soient actuellement dans la peinture universelle : le dessin automatique, la décalcomanie sans objet. Leurs œuvres canalisent librement les révélatrices explorations du hasard contrôlé par la sensibilité humaine. Maintenant que leurs expériences se sont concrétisées dans des réalisations tangibles, ils représentent le seul espoir canadien à un art qui puisse défoncer les limites régionales » (Anonyme, « Vernissage », Le Jour, 20 avril 1946, p. 4).

 

À l’exposition montréalaise, tous les artistes sont présents à la galerie sauf Pierre Gauvreau resté en Angleterre à la fin du conflit pour profiter d’une année pour visiter la France. Pendant l’exposition, les artistes se retrouvent régulièrement sur place pour discuter avec les visiteurs. Claude Gauvreau se rappelle : « L’ambiance était frénétique, nous étions saouls de ferveur et de joie. L’exposition avait lieu dans un milieu populaire et je n’ai jamais oublié depuis que les gens du peuple n’avaient que peu de préjugés et qu’ils parvenaient assez facilement à concevoir la légitimité de cette entreprise à la suite de quelques explications sincères; par contre, dès que surgissait un personnage à bottines vernies, c’était tout de suite l’étalage de prétention sotte et le persiflage d’autant plus méprisant qu’il était plus aveugle. La peinture non-figurative du groupe faisait ses premiers pas en public à Montréal, et le cahier de visiteurs s’emplissait de commentaires injurieux tels que les expositions d’aujourd’hui n’en font plus d’expérience » (Claude Gauvreau, « L’épopée automatiste vue par un cyclope », La Barre du jour, no 17-20, janvier-août 1969, p. 59-60).

 

« Aucune liste complète des œuvres exposées n’a été réalisée : ni par les exposants, ni par les critiques ou la presse. Seules les photographies de Maurice Perron et les quelques mentions par la presse et les critiques nous servent de témoins. Nous savons donc que Paul-Émile Borduas expose des huiles (dont L’île fortifiée, 1941 et L’île enchantée, 1945) et des gouaches (dont le N° 17 et le N° 43). De Pierre Gauvreau, on retrouve notamment Colloque exubérant, Aspect franc et Baie d’esprit. Marcel Barbeau et Roger Fauteux présentent des encres. De Barbeau, notons Les maraudeurs de la nuit. De Fauteux, nous n’avons aucun titre. Fernand Leduc expose entre autres Flore liée. Jean-Paul Mousseau présente notamment Je bois de l’eau d’un puits, Rencontre brusque, Constellations, Fond de mer haïtien et L’oiseau dort. Certains de ces titres renvoient probablement à des dessins faits à la plume et l’encre de Chine. Il réalise également deux sculptures. Enfin, Jean Paul Riopelle expose Ainsi il n’y a plus de désert, Tout se retrouve et Jamais avril n’apparût, qui sont soit des huiles ou des aquarelles » (François-Marc Gagnon, Chronique du mouvement automatiste québécois, 1941-1954, Outremont, Lanctôt Éditeur, 1998, p. 263-264).

 

Le critique d’art Éloi de Grandmont remarque que les œuvres exposées « représentent une tendance bien déterminée de la peinture canadienne actuelle » tout en les associant au mouvement surréaliste (« Les arts. Surréalisme », Le Canada, 24 avril 1946, p. 5). Quant à Jean Ampleman, il décrit ainsi l’exposition : « Élèves et professeur, dans la même salle, au même rang, sans préférence pour l’un ou pour l’autre. Véritable démocratie artistique où seul le talent différencie » (« Expositions. Des disciples au maître », Notre temps, 27 avril 1946, p. 5).

 

L’exposition coïncide avec l’exposition particulière de Borduas au Magasin Morgan’s, et il en résulte, chez la critique, d’une dichotomie entre Borduas et les autres exposants. La critique de Charles Doyon permet toutefois de mieux cerner la relation entre Paul-Émile Borduas et les autres membres du groupe : « Sans bien approfondir le sujet, on a parlé d’imitateurs de Borduas. S’il y a confusion, c’est qu’en certains milieux on manque d’objectivité. Les recherches respectives de ces peintres sont dirigées vers l’exploration du hasard, ce qui fait de ce groupe, mutandiste dirions-nous, une ramification du surréalisme. Mais là s’arrête le rapprochement et toute idée d’imitation doit être écartée chez Borduas et ses continuateurs. D’ailleurs, le style de Borduas les prévient et si des satellites évoluent dans son orbite, il est bien en évidence au centre de ce rayonnement. Tous ces jeunes sont au service de l’art abstrait et ils y apportent leurs qualités personnelles d’adaptation » (« Borduas et ses interprètes ! », Le Jour, 11 mai 1946, p. 7).

 

(Extraits de critiques tirés de F-M Gagnon, Chronique, p. 266-267 et F-M Gagnon, Borduas, MBAM, p. 119.)

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Remerciements

 

Nous remercions les donatrices et les donateurs, privés et corporatifs, qui appuient notre projet et le CIAC MTL. Leurs noms sont donnés sur notre site web (https://ciac.ca/amies-et-amis-du-ciac/).

 

Nous remercions nos chercheurs : Vincent Godin-Filion, Auky Gonzales Gysin et Dominique Robb qui ont pu être embauchés grâce aux programmes d’aide salariale des gouvernements du Canada et du Québec. Merci également à Solenn Lacroix, stagiaire aux communications

 

Claude Gosselin est le directeur général et artistique du Centre international d’art contemporain de Montréal.