LES PAPIERS PEINTS DE DANIEL BUREN

 

 

Daniel Buren. Installation Comme un jeu d’enfant, 2015, Naple. Photo : Amedeo Benestante

Daniel Buren est un artiste français, peintre et sculpteur, né en 1938 à Boulogne-Billancourt. Formé à l’École des métiers d’art, Daniel Buren a l’art traditionnel en horreur. Son goût pour les rayures lui vient de l’emploi dans ses premières oeuvres de tissu industriel à larges bandes verticales, rayures devenues très vite une signature à part entière, même si l’artiste ne se cantonne pas à la simple déclinaison de ce motif.

 

Il accompagne ses installations sonores et visuelles de notes explicatives, s’érigeant ainsi en théoricien de son propre travail. Le 24 décembre 1966, il forme avec Mosset, Parmentier et Toroni le groupe BMPT, proche des positions de l’Internationale situationniste (qui ont largement inspiré la révolte de mai 68). Buren installe ses créations minimalistes dans des lieux publics afin de les dévoyer, selon une vision subversive de l’art. Effectivement, ses oeuvres monumentales place des Terreaux à Lyon et dans la cour du Palais-Royal de Paris (les fameuses “Colonnes de Buren”) ont été plus que controversées dès leur mise en chantier, en 1985… Ce qui n’empêche pas cet artiste d’être reconnu et exposé dans le monde entier.

 

En 1986, il obtient le Lion d’or à la Biennale de Venise. En 2012, dans le cadre du projet Monumenta et après le Leviathan d’Anish Kapoor, il créé une œuvre spécialement conçue pour la nef du Grand Palais. Inconnue jusqu’au début de la manifestation, cette oeuvre est exposée du 9 mai au 21 juin 2012. En 2015, il est choisi par la Fondation Louis Vuitton pour colorer les voiles du bâtiment.

 

Source : Evene.fr

Consultez le site officiel de l’artiste au www.danielburen.com

 

 

 

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L’une des premières s’était déroulée à Quand les attitudes deviennent forme (Kunsthalle de Berne, 1969), où il n’avait pas été invité. Contrairement à la plupart des artistes ayant pris part à ce projet, Buren n’était pas intervenu à l’intérieur du bâtiment mais dans ses environs, en recouvrant des panneaux publicitaires avec des affiches ornées de son « outil visuel » (des rayures verticales roses et blanches de 8,7 cm de large). Comme il avait également recouvert un panneau d’annonces administratives, Buren avait été arrêté par la police et Harald Szeemann avait dû venir le chercher au poste. L’artiste en avait alors conclu que l’ensemble de l’exposition n’était qu’un simulacre de liberté d’expression, puisque cette liberté était encadrée et protégée par les murs symboliques de l’institution muséale : « c’est la pire des expositions politiques parce qu’elle donne aux artistes le sentiment d’être libres, alors qu’ils ne sont que des ours dans un zoo ». Selon lui, la transgression n’était tolérée qu’à condition qu’elle ait lieu dans la Kunsthalle ou en lien avec sa programmation.

 

Cet exemple devrait faire réfléchir ; non pas au cas particulier des interventions de Daniel Buren, mais à la situation plus générale des cartes blanches muséales où, même s’ils sont invités à agir librement, les artistes se contentent le plus souvent de répondre à une commande, témoignant d’objectifs propres aux acteurs des musées et sur lesquels ils n’ont pas vraiment de prise.

 

Extrait de Glicenstein, Jérôme. « Adhérer ou résister : la relation ambivalente des artistes aux musées. » Muséologies, volume 9, numéro 2, 2018, p. 53–67.

 

 

 

Certes, le travail sur commande de Buren conserve, à prime abord, sa dimension critique face au pouvoir culturel. On peut même dire que son grand mérite – ce qui dans son travail nous donne le plus à penser – est d’avoir su proposer visuellement la relation ambiguë qui s’installe entre l’artiste et le musée. D’avoir su, par conséquent, installer son travail critique à l’intérieur/extérieur des institutions visées. Cependant, cette forme parasite de son activité artistique, à force d’être répétée, ne perd-elle pas à la longue sa force de contestation ? Ne risque-elle pas de devenir, comme l’a déjà fait remarquer Y. Michaud, un rituel inoffensif qui s’est lui-même institutionnalisé ? C’est que, il faut bien l’avouer, le nom de l’artiste, désormais reconnu par le système de l’art, est devenu sa marque de commerce. Par exemple, lorsque la Galerie René Blouin invite Buren à exposer les murs de sa galerie, est-ce le regard critique et politique de l’artiste qui est d’abord remarqué, ou est-ce plutôt la galerie elle-même qui vient, par cette exposition, améliorer son prestige ?

Extrait de Paré, André-Louis. « Daniel Buren : l’art(iste) para/site. » Espace Sculpture, numéro 17, automne 1991, p. 47–51.

 

 

 

Le plus inouï, c’est que les mêmes gens à vingt ans d’intervalle, me font des reproches exactement inverses. Au début, j’étais l’artiste le plus absurde, le moins esthétique, le plus banal, parce qu’on ne savait même pas voir des bandes rayées. Aujourd’hui, les mêmes détracteurs disent que c’est très esthétique, très bien installé, etc., « très » étant à prendre dans le sens de « trop » ! Ils font les mêmes critiques, mais en les utilisant à l’envers, à l’autre extrême. Je crois que, fondamentalement, ils ne peuvent pas accepter mon travail parce qu’il bouleverse les habitudes acquises de vision, de rapport à l’œuvre.

– Daniel Buren

Extrait de Brunet-Weinmann, Monique. « Penser le décoratif : entretien avec Daniel Buren. » Vie des arts, volume 32, numéro 130, mars–printemps 1988, p. 52–55.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSAIRE
CLAUDE GOSSELIN, C.M. (c.v.)
Directeur général et artistique
Centre international d’art contemporain de Montréal
claude.gosselin@ciac.ca